
Les cellules souches embryonnaires et le cas de la DMLA
Dans quelle mesure des enjeux éthiques influencent-ils les recherches sur l'embryon : cas de la DMLA ?
III- Une expérimentation concrète réalisée aux États-Unis mais impossible en France
3- D'autres traitements de la DMLA envisageables et envisagées pour remplacer l'utilisation de cellules souches embryonnaires
Depuis leur découverte, en 1998, les cellules souches embryonnaires se sont révélées très prometteuses et utiles. Mais, face aux enjeux éthiques et aux restrictions législatives les concernant, les scientifiques ont compris qu'ils devraient s'intéresser à d'autres méthodes.
Les cellules souches pluripotentes induites :
Les scientifiques s'intéressent en effet à la re-programmation de cellules adultes en cellules pluripotentes ce qui permettrait de pouvoir ensuite les différencier en différentes cellules du corps humain et d'éviter tout problème éthique puisque la cellule de base est adulte. C'est une technique qui a, en 2012, valu un prix Nobel de médecine à son inventeur, le japonais Shinya Yamanaka. En théorie la technique est considérée comme simple mais pose beaucoup de problèmes de mises en pratique en France. Elle consiste en effet a prélever n'importe quelle cellule du corps humain et à la reprogrammer en cellules pluripotentes qui ont la capacité de se diviser à l'infini et ensuite se différencier en chaque cellule du corps humain. Cette technique a pour but, comme les cellules souches embryonnaires, de régénérer des organes et traiter des pathologies considérées jusqu'alors comme incurables. De plus, les cellules pluripotentes induites, qui ont un très fort potentiel, sont obtenues à partir d'une source inépuisable et facile d'accès.
Le Professeur Stéphane Viville, biologiste à l'Institut de Génétique et de Biologie Moléculaire et Cellulaire de Strasbourg explique qu'il suffit de prendre n'importe quelle cellule du corps et de lui implanter quatre gènes caractéristiques des cellules souches pluripotentes : l'Oct3/4, le Sox2, le c-Myc, qui est connu pour faire proliférer les cellules et le Klf4. Ces quatre gènes sont majoritaires dans les cellules souches embryonnaires. Ils permettent à la cellule de retrouver son comportement immature et sa grande prolifération, caractéristiques de la pluripotence. Pour introduire ces gènes, les chercheurs utilisent la même technique que pour la thérapie génique : ils utilisent un virus privé de son matériel génétique, rendu inoffensif, comme vecteur dans lequel ils implantent les quatre gènes de la pluripotence. Puis introduisent le virus dans la cellule, il pénètre ensuite dans le noyau et y dépose son matériel génétique. Les chercheurs utilisent des vecteurs non intégratifs comme des plasmides ou le virus de Sendaï qui, permettent d'éviter toute mutation du gène transmis.
La cellule retrouve alors un état de pluripotence, elle est de nouveau capable de se diviser à l'infini et de se différencier en n'importe quel type de cellule du corps. A partir de là, le processus est le même que pour les cellules souches embryonnaires, on fait en sorte que la cellule se différencie en cellule épithéliale pigmentaire puis on l'implante au niveau de la rétine dans le but de régénérer les photorécepteurs.

Principe de la reprogrammation de cellules banales en cellules souches pluripotentes induites
La thérapie génique :
La thérapie génique, découverte en 1950, consiste à envoyer un gène sain dans une cellule défectueuse pour qu'il remplace le gène défaillant et se répande dans l'organe pour le régénérer. Le gène fonctionnel est implanté dans un virus vecteur AAV non pathogène, dont on supprime l’information génétique virale ou dans un liposome, qui est transmis, injecté au patient au patient. Le virus, comme il ne possède pas les structures nécessaires à sa survie et à sa reproduction va se déplacer jusqu’à la cellule cible pour pouvoir utiliser ses ressources. Il y transfère le gène sain qui migre ensuite dans le noyau et répare le gène défaillant. Le gène devient alors sain, se reproduit et peu produire des protéines fonctionnelles et donc, régénérer l'organe touché. Le génotype influence le phénotype moléculaire qui lui, influence le phénotype cellulaire qui influe le phénotype organique.
En ce qui concerne la DMLA, les scientifiques cherchent à implanté un gène codant un anti-VEGF. Les anti-VEGF (Vascular Endothelium Growth Factor = Facteur de croissance endothélium) permettent de réguler la néovascularisation , le développement de vaisseaux sanguins, de la rétine et donc de limiter le développement de la DMLA humide. En développant un gène codant de l'anti-VEGF, la DMLA humide serait contrée.
Les scientifiques s'intéressent aussi au développement d'un gène appelé « pigment epithelium-derived factor ». C'est un facteur régulant aussi la néovascularisation et qui est naturellement produit par les cellules épithéliales. Ce gène est en défaut chez les personnes atteintes de DMLA.
Dans chacun des cas suivant, la thérapie génétique serait utilisée pour implanter le gène sain dans l'oeil et stopper la dégénérescence de la rétine.
La thérapie génique est aussi utilisée dans bon nombre d'autres maladies : cancers, maladies génétiques, tumeurs...
Enfin, les chercheurs tentent, grâce à la thérapie génique de re-conditionner les cellules ganglionnaires de la rétine en cellules photosensibles pour pallier à la perte de photorécepteurs.

Principe de la thérapie génique dans le traitement de la DMLA
L'oeil bionique : une solution concrète
Dès 1960, les scientifiques du monde entier commencent à s'intéresser à la bionique, qui vient de l'anglais : bionics, mélange entre biology et electronics. Cette science consiste en une analyse de complète systèmes biologiques dans le but de créer des systèmes artificiels pouvant remplacer des membres du corps. La bionique est facilitée par l'essor des nanotechnologies, outils et techniques de l'infiniment petit (millionième de millimètre, échelle moléculaire) et des microtechnologies, à échelle cellulaire. Les nanotechnologies permettent ainsi des diagnostiques et des traitements efficaces vu que l'on peut agir directement à l'échelle moléculaire. Toutefois, l'usage de nanotechnologies reste encore limité, tout comme notre capacité à imiter la nature dans l'organisation et la conception des organites, tissus, cellules…
En 2001, l'entreprise californienne Second Sight Medical Products révèle son projet au monde : redonner la vue aux personnes atteintes de cécité. C'est alors qu'ils dévoilent la prothèse rétinienne Argus II assimilée à un œil bionique. Les patients sont équipés de lunettes dans la monture desquelles est installée une caméra :

Les données captées par la caméra sont traitées par un boîtier et transformées en instructions transmises à un implant oculaire posé lors d'une intervention chirurgicale. Il est composé d'un récepteur et d'un faisceau d'électrodes qui stimule les photorécepteurs de la rétine. Le message transmis par le boîtier est alors converti en impulsions électriques qui stimulent les cellules de la rétine qui vont transmettre cette information au nerf optique.

L'information est alors reçue par le cerveau :

Les patients doivent subir une rééducation de deux ans pour réussir à interpréter les signaux lumineux reçus par le cerveaux.
Testé pour la première fois sur l'homme aux États-Unis, en 2013, l'oeil bionique permet à des personnes non-voyantes de voir mais est aussi à des personnes atteintes de rétinites pigmentaires et donc de dégénérescence maculaire liée à l'âge. Les patients équipés de ce système retrouvent une vie tout à fait normale, il peuvent à nouveau skier, faire du tir à l'arc et n'importe quelle action de la vie quotidienne. Cette technique se répand peu à peu, on compte ainsi une vingtaine de patients ayant déjà eu recourt à cette technique, en France, aux Etats-Unis, en Italie et en Allemagne. On espère, à terme, pouvoir généraliser cette technique et donner, redonner la vue à tous ceux atteints de cécité.
Les cellules souches adultes :
Il existe aussi des cellules souches adultes qui se situent dans la moelle osseuse et dans le cordon ombilical. Ces cellules sont appelées « cellules souches hématopoïétiques ».
Dans la moelle osseuse, le sang, la graisse et le cordon ombilical, on trouve aussi des cellules souches mésenchymateuses qui peuvent produire des os, cartilages et de le graisse. Ces cellules sont dites multipotentes puisqu'elles produisent plus d'un type de cellules du corps, mais pas tous.
Il existe d'autres cellules souches adultes, les cellules souches de la peau : les cellules souches épidermiques qui assurent la régénération quotidienne de l'épiderme et les cellules souches du follicule pileux qui régénèrent les follicules pileux, les glandes sébacées et l'épiderme.
Ces trois types de cellules, évoquées précédemment, sont exploitées dans le cadre de greffes et de régénérations ou création d'un type particulier de structures ce qui évite l'utilisation de cellules souches embryonnaires. Comme elles sont déjà en voie de différenciation, elles ne peuvent être utilisées dans le cadre d'un traitement de la DMLA.
Les chercheurs du monde entier travaillent d'arrache pied sur toutes ces techniques de traitement, aussi bien pour la dégénérescence maculaire liée à l'âge que pour d'autres maladies telles que des cancers, tumeurs, maladies génétiques… Beaucoup d'entre eux s'intéressent aux cellules souches embryonnaires, connues pour leur très fort potentiel. Mais, depuis quelque temps, les scientifiques travaillent au développement des cellules souches pluripotentes induites. Leur but est de comprendre les maladies pour pouvoir les détecter et les prendre en charge le plus tôt possible afin de garantir un maximum de chances de guérison.
*Positionner la souris sur les mots suivis d'un astérisque pour en faire apparaitre la définition